Dans un article intitulé « Comment en finir avec la République?« , sous-entendu la Ve république française, Roccu Garoby, Vice-Président de l’ALE Jeune au Parlement européen, montre la dangerosité de cette république, « car elle concentre tous les pouvoirs dans les mains d’une seule personne sans véritable contre-pouvoirs« .
République, Monarchie, Démocratie
Or il semble que certaines personnes mal informées aient lu cet article « en diagonale » et qualifient son auteur de « nostalgique de la monarchie« ! Il est vrai que Roccu Garoby dénonce à juste titre le dogme de la République « une et indivisible » défendu par « les ayatollahs de l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon à l’extrême droite de Florian Philippot en passant par les Jacobins du PS et de LR« .
Et il poursuit en montrant que des monarchies sont parfois plus respectueuses de la diversité et de la démocratie que notre Ve république. D’ailleurs avant son élargissement actuel, « l’Europe des six », comme on l’appelait alors, comprenait trois monarchies (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg) et trois républiques (Allemagne, Italie, France), qui étaient toutes des démocraties, régies par une constitution, dirigées par des gouvernements issus du suffrage universel et garantissant une égalité des chances à toutes et tous avec les mêmes droits et les mêmes devoirs…
Mais seule la France a conservé dans ses structures et son fonctionnement un « mode de vie » hérité de la monarchie absolue et de l’empire napoléonien. L’élection du président de la république au suffrage universel direct est là pour nous rappeler que le locataire de l’Elysée détient un pouvoir absolu qui n’a rien de démocratique: inattaquable pendant cinq ans… et même très difficile à poursuivre après (Cf Chirac… et aussi Sarkozy!), il peut faire ce qu’il veut et n’a de compte à rendre à personne. De même, que dire du centralisme de l’Etat sur Paris, aggravé aujourd’hui par la fusion irréfléchie des régions sans tenir compte des critères historiques, géographiques, économiques, culturels? Que dire du maintien des préfets -véritables gouverneurs de provinces- à la tête de toutes nos structures administratives, personnages non élus qui représentent le monarque élyséen et sont de fait les véritables maîtres de nos territoires?
Le terme de « république » ne doit pas faire illusion. La république fasciste de Salò en Italie ou celle de Pinochet au Chili, celle de Mao en Chine ou celles de l’URSS seraient-elles plus enviables que les royaumes de Suède ou de Norvège, uniquement parce qu’elles s’appellent « république »?
De même, une « République une et indivisible à la française », qui va incendier l’Europe à partir de 1792 et pillera tous les pays conquis (« Tout ce qui se trouve en Belgique doit être amené en France, il faut dépouiller ce pays » dira le général Carnot) ou massacrera près de 20% de la population en Savoie occupée de 1792 à 1815, s’emparera des richesses de l’Afrique au nom du « droit des races supérieures sur les races inférieures » (dixit Jules Ferry en 1885), mènera une guerre infâme en Algérie après la Libération (dès le 8 mai 1945) au nom d’une « France de Dunkerque à Tamanrasset », s’acharnera à détruire les langues et cultures historiques de nos territoires … cette république-là est-elle vraiment défendable?
Renverser la Tour Eiffel
Depuis des années, le POC (Partit Occitan) et l’ensemble des partis de RPS (Régions et Peuples Solidaires) réfléchissent à l’avènement d’une VIe république. Or d’éminents dirigeants d’organisations politiques parisiennes pensent aussi aujourd’hui à changer le numéro de notre république: mais parlent-ils du même contenu? Sont-ils prêts à dépasser le dogme « un et indivisible » d’une Patrie-Messie « éternelle lumière de l’univers »? On peut en douter, vu le conditionnement idéologique hexagonal qui les a formatés à l’école, à l’armée, dans leur parti…et même pour certains au catéchisme: « Catholiques et Français toujours« , chantait-on à une époque!
Devant le fonctionnement anti-démocratique et même le blocage de nos institutions, une nouvelle constitution pour une VIe république, qui ne peut être que fédérale, est devenue indispensable. Elle devra en finir avec le centralisme bonapartiste, qui concentre tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme à Paris: la légitimité démocratique devra résider dans une Assemblée élue à la proportionnelle, qui désignera un gouvernement responsable devant elle.
Et surtout il faudra revoir la carte des régions improvisée par Manuel Valls, et leur donner de véritables pouvoirs en matière fiscale, législative et règlementaire. Elles assureront de ce fait un contre-pouvoir démocratique en gérant elles-mêmes les affaires de nos territoires au plus près des citoyennes et des citoyens, en coopération avec les euro-régions voisines, dans le cadre d’une Europe politique des peuples et des régions solidaires à construire. C’est dans nos territoire seuls que peuvent être mises en place des politiques efficaces pour l’environnement, l’écologie et la défense des identités culturelles entre autres. Cela suppose bien entendu la suppression des préfets et de leur administration, qui sont une survivance des intendants sous la monarchie capétienne.
Ainsi en « déshexagonisant » les têtes politiques et en renversant la Tour Eiffel, la république deviendra peut-être démocratique…
Georges LABOUYSSE