Abrité par les lambris dorés des palais de la république, droit dans les bottes d’un pouvoir centralisé et sans partage, le président Hollande continue sur sa lancée néolibérale de réduction austéritaire des déficits. Paradoxe ultime, il dit avoir entendu le message du peuple mais sans rien changer à des orientations sur lesquelles il n’a pas été élu et qui mène la gauche, à commencer par le PS, aux Sant Aliscamps ou, selon vos croyances, dans le plus profond des abîmes.
La colère liée à une pression fiscale très majoritairement tournée vers le remboursement de la dette des banquiers, l’avenir bouché d’une jeunesse sans logement et sans emploi, les inquiétudes d’un secteur public dont le modèle redistributif (de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins) et protecteur se délite chaque jour un peu plus, les interventions à contresens d’une Europe plus soucieuse d’équilibre monétaire ou de taille des concombres que de questions géostratégiques ou de programmes d’investissement en faveur de la transition écologique ont massivement tourné les urnes vers un vote extrême aussi nationaliste que sectaire.
Le débat sur l’Europe n’a pas eu lieu et c’est un refus de la politique menée par le pouvoir qui s’est massivement exprimé. Si cette colère est compréhensible on ne saurait rester sans réaction face aux moyens d’expression choisis par une part croissante de l’électorat qui s’exprime encore.
EELV, qui dans le Sud-Est perd deux sièges de députés européens, paye la participation au gouvernement, les querelles internes, son refus de reconduire l’accord de 2009 avec Régions & Peuples Solidaires, ainsi que le départ de piliers comme Conh-Bendit ou encore l’éloignement d’intellectuels comme Larrouturou qui, avec l’émergence de Nouvelle Donne, les a privés de suffrages comme de dynamique.
Le Front de Gauche maintient ses positions mais ne « capitalise » pas une colère sociale, pourtant bien réelle. Il n’est pas en capacité de structurer une vraie alternative.
Nos résultats confirment, une fois de plus, les grandes difficultés du régionalisme politique, comme du fédéralisme, à vraiment émerger sur la scène publique. Deux facteurs en sont la cause : La faiblesse chronique de notre organisation qui n’est pas audible auprès du grand public et n’a pas de tête de pont médiatique sur le plan hexagonal d’une part, et les évolutions démographiques d’un territoire soumis à une très grande pression foncière. Les nouveaux arrivants sont hermétiques, voire hostiles, aux propositions d’un régionalisme politique qui s’exprime- et c’est conforme à son histoire comme en lien indestructible avec ses revendications-, dans une langue qu’ils perçoivent comme totalement étrangère.
La droite engluée dans les affaires et fortement divisée n’incarne pas non plus une nouvelle voie et force est de constater que le seul gagnant de ces élections européennes est l’extrême droite. Un FN dangereux mais aux portes du pouvoir d’Etat. Un pouvoir que le centralisme comme le vote majoritaire ont rendu absolu. Un FN dont le racisme est de moins en moins caché. Un FN qui veut sortir de l’Euro et de l’Europe (propositions qui pourraient bien dans une logique référendaire être majoritaires), ce qui produirait un strict enfermement géographique et engendrerait une crise économique et sociale majeure dont l’issue pourrait bien être la même que celle de la grande crise de 1929, à savoir la seconde guerre mondiale.
Face à l’autisme du pouvoir central comme à la triste réalité électorale de nos territoires, nous avons la responsabilité de réagir.
Même si le PS qui détient l’Etat avec une majorité dans les deux chambres, les régions et les départements aura gâché une formidable opportunité de changement de cap, notre devoir n’en est pas moins de lancer un appel à la plus grande union de la gauche, des écologistes, des régionalistes, des démocrates pour que notre région ne soit pas gérée demain par le clan Le Pen.
Oui, les élections régionales de 2015 ou 2016 seront de nouvelles élections intermédiaires. Non, la politique austéritaire, prétendument anti-chômage, les solutions croissantistes sur lesquelles le pouvoir, en dépit des coups de mentons de Manuel Valls ou de la méthode Hollande-Coué, ne porteront pas des réponses à la hauteur des besoins. Alors, les mêmes causes vont produire les mêmes effets et cela nous est insupportable !
Même si ce n’est pas, loin s’en faut, notre premier choix politique et parce que contrairement au pouvoir central nous ne sommes pas « Sensa Tèsta », nous plaidons pour le regroupement, dès le premier tour, pour faire barrage à l’extrême droite et enfin créer ces rassemblements alternatifs et citoyens capables de mener des politiques culturelles et sociales et ainsi faire renaître un espoir durable.
Hervé GUERRERA