N°193 – Autopsie d’une inquiétude (Lo Cebier 138)

Juin 18, 2014

A la suite des résultats obtenus par le FN aux élections européennes, nous revenons sur notre dernière annonce invitant nos lecteurs à lire et faire connaître le livre de Bernard Turle sur ce syndrome annoncé dans le Var et au-delà. Une lecture non parisienne de l’extrême-droite.

 

Autopsie d’une inquiétude

Contact : Marie-Laure Blot. Tel.01 42 57 82 08. mlblot@bourin-editeur.fr – 15€

 

   Un livre qu’il faut lire et faire lire. La cantonale de Brignoles annonçait l’irruption du FN aux municipales et la montée d’un vote populiste renforcé par une abstention massive. La Gauche triomphait de peu à la présidentielle pour venir mourir sur la grève de l’austérité et de la dette laissée et à venir. C’est fait.  Pour demain, faisons confiance à la lecture « nationale» des instituts de sondage, des sociologues patentés et des médias en mal d’événements. Ils nous diront la suite comme si nous y étions. Mais là aussi, c’est fait…Voici pour la mise en perspective.

 

Le livre de Bernard Turle dit beaucoup plus qu’un épisode électoral. Il prolonge le roman provençal qui s’inscrit dans la « modernité » hexagonale en région. Cette génération a suivi de près, quarante ans de reng, cette déterritorialisation du pays. La question de l’eau en pays méditerranéen, cet exemple phare, a toujours été un drame sociétal central : détournement de la fonction agricole initiale du canal de Provence, submersion du village des Salles au profit du barrage de Sainte-Croix, et les nombreuses affaires locales qui impliquèrent des élus locaux dans des dossiers juteux, aux implications juridiques étouffées par le temps. Ne parlez pas de la terre : elle disparaît sous la pression démographique, la concentration de populations héliotropiques, la sur-urbanisation de la côte avec ses maisons néo-provençales balafrant còlas e baissas du Nord au Sud, sens suc, pour l’habitant qui a gagné ses quatre sous et pour le promoteur qui fait bombance du désir défoulé des néo-arrivants. Les « trente glorieuses » sont passées par là avec cet autre désir provoqué de consumérisme. Sortie-est de Toulon, visitez Grand-Var, vitrine de la marchandisation et du tertiaire triomphants, où se font les sorties dominicales des familles hlmisées; autrefois zone agricole de maraichages, de fruitiers et de vignes, aux portes du port nucléarisé devenu alignement de restaurants pour touristes. Ici, trop de Provençaux ont cédé au profit immédiat en vendant leur terre et leur âme.

 

Les néo-quelquechose (Brignolais, Seynois, Toulonnais…) ignorent les terrasses de café, et les rues sont désertes après huit heures du soir. L’enfermement télévisé des familles repliées dans les nouveaux quartiers a tué toute méridionalité. La langue d’oc, refoulée des familles provençales, a fui cet univers standardisé où l’accent finit par se perdre. Et cet « oubli » témoigne de la mise au pas d’une logique  qui cache son nom, normalisation. Ce mesclum de l’institution, des corps politiques et du marché  anticipe un « ordre nouveau ». Le Var rouge et républicain a tourné la page, le clan des affairismes politiciens lui a succèdé.

 

Que nòvi ? Cette farandole grinçante de la dépression provençale annonce les scores du FN. Le terrain a été préparé depuis longtemps. Bernard Turle en fait la géoscopie cordiale et inquiète, en homme du pays et dans un style vivant qui décrit ce crève-cœur. Autopsie, au sens littéral, de visu, in situ, pour expurger le mal qui ronge ce pays défait, aux effets attendus par les plus lucides, mais qui n’est pas encore vaincu. Cridarem pas ceba serait le mot de l’ouverture et non de la fin ! C’est ce que nous lisons entre les lignes.

                                                                                                           Gérard Tautil

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N°193 – Lo Forum d’Oc pren plaça dins lo païsagi (Lo Cebier 138)

Juin 18, 2014

Dre que lo movament occitanista e lo movament mistralenc an fenit de si far guèrra dobèrta, metem vèrs la fin deis annadas quatre-vint, s’es pausat en Provènça la questien d’una federalisacien deis energiés faci a la societat e au poder politique. Après quauqueis òucasiens mancadas, dos evenaments an precipitat la convergènci. Promier, la gisclada d’un movament renegant l’unitat de la lenga d’òc, qu’un concors d’oportunitats politicianas a dotat d’una virulènci inesperada. Segond, la volontat de rèndre vesibla la coërènci de la revendicacien lingüistica qu’a menat a la coordinacien Anem, òc e ai grandei manifestaciens pèr la lenga que si son reproduchas jusc’a l’an passat.

 

Se leis abitualas charpinadas internas, poderosament ajudadas pèr lo tuèrt de personalitats volcanicas, an fenit pèr aguer la pèu d’Anem, òc, rèsta qu’en Provènça es a sa declineson locala, pus pacifica, que devèm la creacien dau Forum d’Oc. Longament preparada pèr dos ans de discrètei conferèncis a la cima, èra inaugurada pèr lo colòqui regionau tengut en Novèmbre darnier au palais dau Faròt de Marselha sus l’avenir de l’occitan en Provènça. L’interès militant qu’a provocat aquela manifestacien a mostrat coma respondié a n un desir e un besonh pèr sortir de la situacien estadissa monte leis embròlhs provençaus nos avien enfangats. Anonçat a la conclusien dau colòqui de Marselha, lo Forum d’Oc avié plus qu’a crèisse.

 

Seis autors, l’IEO, lo Felibrige, e leis associaciens cargadas de l’ensenhament (AELOC, APLR de Niça, Calandretas) an elaborat la Charta dau Forum (si pòu legir sus lo siti de Regien-Provènça-Partit Occitan : http ://occi.free.fr). Tota associacien, grope culturau o artistique, establiment escolari, administracien, coleitivitat locala, entrepressa, etc, (a l’esclusien dei partits politiques e gropaments confessionaus) pòu si declarar aderènt au Forum simplament en mandant un mail a contactforum@gmail.com. L’adesien es gratuita.

La promiera fasa dau Forum es justament la costitucien d’una basa la mai alargada possible. Totei lei militants son convidats a recomendar l’adesien pròchi leis istituciens que nen son membres o monte an de relaciens. Es evidènt que la fòrça dau Forum dependrà de l’amplor de sa representativitat. Lo recampament a naturalament pèr tòca de renforçar l’acien de cadun pèr une messa en comun dei ressorças sus de projèts coleitius a l’escala regionala, e tambèn pèr èstre una fòrça de proposicien pròchi lei decidaires regionaus e mai que mai leis elegits. A l’ora que la Regien va aguer un ròle de coordinacien major dins la promocien de la lenga regionala, lo sucès dau Forum es vitau tant pèr l’acien culturala que pèr l’acien politica, qu’en bòns occitanistas si refusarem totjorn de separar.

 

La promiera reünien dau Forum si tendrà en Òutòbre, e n’i aurà dos pèr an. Lei militants e simpatisants dau POC seràn tenguts au fiu ; d’aquì ‘quì, li faudrà si mobilisar pèr convincre lo mai possible d’istituciens de n’en faire partida.

Alan Barthélemy-Vigouroux

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N°193 – « Ligne Nouvelle » et Ligne à Grande Vitesse en Provence : Les mensonges de RFF et du préfet (Lo Cebier 138)

Juin 18, 2014

 

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Lo Cebier : Depuis la création du collectif Stop LGV-Sud Sainte-Baume, la mobilisation n’a pas faibli et s’est même amplifiée avec la création d’une coordination régionale. Vous pouvez faire le point rapidement ?

 Didier Cade : En effet, depuis la création du collectif Stop LGV Sud Sainte-Baume, le souhait de rejoindre tous les opposants à ce projet de ligne nouvelle s’est imposé comme une évidence. Cela nous a semblé être la seule solution pour s’opposer efficacement. Il nous fallait cette taille critique pour espérer être entendus par les décideurs départementaux, régionaux, nationaux. Nous y avons gagné en expertise, en force pour lutter contre la division recherchée par RFF et le préfet.

Le partage d’une position argumentée et construite nous a permis des rencontres avec la préfecture de région et un conseiller du ministre délégué aux transports…Le problème est qu’ils font la sourde oreille. Les mobilisations ont été nombreuses depuis la création du collectif : manifestation au Beausset, plusieurs fois à Toulon, intervention lors de la concertation (Marseille, Nice, Menton),  signature d’une pétition, rencontre avec les élus ou des candidats pour échanger nos arguments. Depuis quelques mois la mobilisation s’est calmée suite aux discours officiels sur les finances publiques qui ne permettent plus ce genre de délires. Les dernières actualités de la LGV (consultation du public dans les gares et mairies concernées par le fuseau retenu) ont réveillé les citoyens. Nous insistons sur la nécessité de remplir les documents (téléchargeables sur le site internet de RFF et celui du Collectif (stoplgvsudsaintebaume.org). Nous organisons une marche contre le projet le samedi 14 juin à Sainte- Anne d’ Evenos et nous récupérerons les imprimés. Nous souhaitons que la mobilisation s’amplifie encore afin de relancer des actions d’envergure.

 

Lo Cebier : La « LGV-Ligne Nouvelle » entrerait en gare avec un nouveau fuseau Aubagne-Brignoles, annonce le préfet. La ficelle de la « stratégie des deux bouts » avec l’Est varois-Cannes) est-elle si grosse qu’elle peut encore tromper une opinion soumise à la désinformation ?  Qu’en est-il de la ligne Gardanne – Carnoules et de la mise à niveau des voies existantes ? Les transports de proximité ne sont-ils  pas toujours ignorés?

D.C– Les populations sont manipulées par les différents discours « officiels »:

-« nous devons faire des économies » les gens entendent: le projet ne se fera pas car trop cher…

-« nous donnons la priorité aux trains du quotidien ». Les gens entendent : le projet ne se fera pas car le tgv n’est pas un train du quotidien…

Pendant ce temps le projet continue et le préfet en imposant à la presse une communication sur la LN-PCA (ligne nouvelle Provence-Côte d’Azur)  essaye de faire oublier la LGV PACA et toutes les oppositions qu’elle a soulevées. Réseau Ferré de France propose à la consultation un fuseau validé à 190 millions d’euros le kilomètre. (Jamais projet n’a été si cher!). Ce « nouveau projet » reliant Marseille à Toulon après avoir traversé Marseille en souterrain (plus une nouvelle gare) ainsi que  le Muy à Nice avec création de deux nouvelles gares, est semblable en tous points à la LGV PACA (coût, temps de passages, dégâts sur l’environnement, l’agriculture, les nuisances sonores, les effets induits à long terme. Nous sommes bien loin de pouvoir parler de démocratie et de débat public… Même le mot concertation est bafoué puisque le discours est à sens unique et les arguments retenus sont toujours ceux de la préfecture.

Pendant ce temps la réouverture de la ligne Carnoules-Gardanne reste dans un carton bien fermé. Dernièrement une variante du projet (nouveau fuseau Aubagne/Brignoles) proposé par l’association « tgv développement », « officialisée » par une rencontre avec un conseiller du président de la République, alors que le fuseau a été validé par  la préfecture du Var, démontre la manipulation scandaleuse orchestrée au plus haut niveau de l’Etat. En effet, elle a eu lieu et été médiatisée au moment de la consultation du public, rien de mieux pour faire diversion!

 

Lo Cebier : Que devient donc le projet d’une gare de surface à Toulon ?  Le sillon varois en bordure des Maures n’est donc pas abandonné ?

D.C– Le projet de gare en surface à Toulon est validé par le préfet du Var. Le projet consisterait au rajout d’un quai côté nord de la gare actuelle pour arriver à six voies à quai.  Pour quel coût? La continuité Toulon /le Muy est elle aussi dans le projet et constitue la phase 3 annoncée pour 2050. Elle pourrait être officialisée plus tôt pour  permettre le gel des terrains. C’est là aussi une stratégie chère à RFF et au préfet : diviser pour mieux régner.

Lo Cebier : La stratégie de RFF et du préfet a été de mentir de bout en bout. La pseudo concertation des usagers des transports, la fausse démocratie refusent de reconnaître la fonction sociale des transports pour les Varois et les Provençaux. Ne faudrait-il pas insister encore sur cet aspect du dossier dans les interventions prochaines ?

D.C -Les transports ont de fait une fonction sociale… nous avons toujours dit et continuerons d’insister sur la nécessité d’améliorer les conditions de transport des usagers des trains du quotidien. Mettre autant d’argent dans un projet qui sert à une minorité est proprement scandaleux. Une ligne nouvelle estimée a minima 20 milliards d’euros qui ne correspond ni à nos besoin, ni à nos possibilités de financement, voilà le projet que l’on veut nous faire payer. Les hausses d’impôts entraîneront des difficultés prévisibles pour nombre de foyers qui sans doute n’auront d’autre choix que de s’éloigner vers les zones les moins chères. Les effets à long terme d’un tel projet sont incalculables mais le déni de démocratie et les manipulations ont des effets mesurables par l’opinion que les citoyens ont de la classe politique dirigeante…

Lo Cebier : Curieusement on ne parle plus de l’Arc méditerranéen, argument qui était mis en avant lors du débat public.

D.C– L’Arc méditerranéen n’est plus mis en avant dans notre région car le volet rapidité de transport est volontairement occulté: la vitesse n’est pas porteuse pour faire accepter ce projet par l’opinion publique. Elle ne correspond pas à l’image de nos territoires et a stigmatisé l’opposition au projet,  contrairement à d’autres régions plus perméables à cette notion. Le déficit, en trains du quotidien et l’opposition grandissante face aux grands projets imposés et inutiles contraint les décideurs à faire passer ce projet pour ce qu’il n’est pas. Après avoir investi  pour cette ligne nouvelle, la région n’aura plus de marge de manœuvre pour financer des TER ou la réouverture de lignes desservants des territoires pourtant en forte expansion démographique. Le projet financé à 90 % par des subventions publiques (nos impôts à venir)  ne sera jamais rentable (un tiers des liaisons LGV opérées par la SNCF ne le sont pas). Il est encore temps d’arrêter et de foncer dans le mur …à grande vitesse! »

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N°193 – Le loup, la bergère et une certaine Europe (Lo Cebier 138)

Juin 18, 2014

   

 

   Un de nos amis, éleveur caprin et co-responsable de la Confédération Paysanne du Var nous a fait parvenir ce témoignage d’une habitante du Pays d’Albion en Vaucluse. Plutôt que d’en faire un article, nous avons préféré en donner des extraits significatifs, sans commentaires superflus. Nous mesurons tout le désarroi de Mme Christine Fra, son auteure. Qu’elle soit assurée de notre compréhension et de notre solidarité. La défense de la faune sauvage, réintroduite ou pas, pose de façon urgente la défense des troupeaux et la volonté de vivre et travailler au pays pour nos éleveurs déjà soumis à la concurrence du marché international. Ce drame est celui d’une vie patiemment construite et vite défaite. Le troupeau a été vendu. Ce que ne comprennent pas certains « environnementalistes», « défenseurs des animaux » et encore moins les lobbies qui les soutiennent.

 

« Le 7 août au matin, j’étais à la distillerie (de lavande, ndlr) lorsque mon mari m’a appelée pour me dire que mes brebis étaient rentrées en bergerie. Chose anormale puisqu’elles étaient enfermées dans le parc. Il les a alors cherchées et là l’horreur s’est affichée en plein jour. Sur le chemin qui descendait au parc, tous les 100 mètres à peu près, une brebis égorgée, intacte, seuls 4 crocs très visibles sur la gorge, il en a compté 4. Dans la direction opposée à la bergerie, sur la suite du chemin après le parc, 4 autres sur 1 km de distance. Sur les 8, seule une épaule a été consommée. Il nous a fallu 3 jours à 9 personnes pour rassembler la totalité du troupeau. 5 n’ont jamais été retrouvées. Il a fallu que je tienne dans mes bras 8 autres brebis pendant que le vétérinaire les euthanasiait, toutes avec des traces de crocs dans la gorge. J’aurais aimé que les « pro-loup » soient là pour les tenir et qu’elles vous regardent bien dans les yeux et que les leurs s’éteignent. (…)

 

Mon voisin également éleveur a été attaqué 10 jours plus tard, 9 brebis mortes, aucune consommée.

Le 4 septembre c’est grâce à sa voisine que le loup n’a tué qu’une brebis. Il a dû dormir jusqu’au mois de novembre dans une caravane au milieu de son parc de brebis ; nous habitons à 1100 m d’altitude et au mois de novembre, sans chauffage. Travailler oui, mais pas comme çà !

J’ai vendu mon troupeau, mon voisin ne va pas tarder à faire de même, et bientôt il n’y aura plus d’éleveurs. Les montagnes et collines ne seront plus pâturées, les pistes de skis ne seront plus tondues, les feux de forêt pourront ravager la Provence.

Il y a 15/20 ans nous donnions l’alerte aux autorités sur la prolifération des sangliers, on nous riait au nez. Et maintenant ? Les villes et villages sont envahis. Le sanglier dans certains départements est même classé nuisible ! Le loup n’a aucun prédateur, même pas les chasseurs. Qu’adviendra-il dans 15 ou 20 ans pour le loup ? Une louve porte 4 à 6 petits par an. Tout comme le sanglier il envahira les villes et villages car les ordures urbaines sont aussi intéressantes pour eux que pour les sangliers. Alors peut-être que nous, les anciens éleveurs, on pourra remettre des brebis car les loups auront déserté nos campagnes…

Merci aux pro-loup, et à la « directive habitat » de l’Europe de m’avoir permis de prendre pour la première fois en 20 ans d’élevage 15 jours de vacances en novembre, de n’avoir plus à subir la pluie lors des jours de garde, ou d’être piquée par le mistral. C’est la colère qui s’installe peu à peu. Le devenir de tous les élevages français semble de plus en plus compromis.

Un collaborateur d’un ministre de l’agriculture en 1994 avait dit à mon mari que l’Europe destinait la France au bronzage, et que nous mangerions de la viande polonaise, roumaine et hongroise. Les légumes, ce serait l’Italie et l’Espagne. Dure réalité, et que nous fera-t-on manger ? Du chat pour du lapin ? Des légumes sulfatés avec des produits hautement cancérigènes interdits en France depuis 10 ans ? La mort de l’agriculture Française est programmée depuis longtemps.

L’Europe s’en prend même à l’huile essentielle de lavande ! Elle a classé ce produit naturel en produit chimique. Les producteurs mènent le combat, on aura certainement besoin de tous les Provençaux et même de tous les utilisateurs d’huile essentielle, pour combattre cette hérésie. Si l’application de la directive REACH devient effective, sur tous les produits contenant 0.05 % d’huile essentielle on devra apposer des étiquettes avec le poisson mort, les poumons qui explosent, et la croix de St-André. Qui va acheter nos produits après çà ? Sans compter les dossiers à remplir pour distiller les plantes. Bref de beaux combats en perspective. La Provence sans lavande, ce ne sera plus la Provence. Vive l’Europe ! J’ai été bavarde, mais je ne sais pas si j’ai su vous expliquer ce que l’on ressent dans des moments pareils, je l’espère. Cordialement. »

 

Christine FRA. Pays d’Albion en Vaucluse

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N°193 – Convivencia e « partatge » (Lo Cebier 138)

Juin 18, 2014

Et un dessin sur la pauvreté, pourquoi pas ?

A la fin de l’année 2013, nous nous sommes lancées dans une belle aventure : notre participation à la Maison Commune de Cavaillon (Vaucluse) qui regroupe trois associations : le Village, les Restos du cœur et le Secours populaire français. Ce projet qui n’a apparemment rien d’occitaniste l’est en réalité totalement dans son esprit, d’où notre titre. Ces trois associations, bien que différentes dans leur fonctionnement, travaillent ensemble, en parfaite harmonie, se «partageant» le public accueilli. Projet unique en France, il n’est pas né sans difficultés et ce n’est qu’au bout de trois longues années de tractations qu’il s’est enfin concrétisé. Si les Restos du cœur et le SPF sont bien connus de tous, il n’en va pas de même du Village qui est une structure tout à fait originale.

Le Village est un lieu de vie où l’on accueille un public fragile et en grande difficulté. Il dispose d’atouts majeurs tels qu’offrir sur un même lieu de l’hébergement et du logement associés à des activités de production : l’atelier maraîchage qui emploie en tout une vingtaine de personnes et propose à ses adhérents des paniers de légumes frais, cultivés de manière biologique et la fabrication de briques en terre crue. Avec la Maison Commune, le Village a ouvert un second lieu qui fonctionne en accueil de jour (thé, café, écoute, douche, machine à laver, sèche-linge et bagagerie). Le but serait que ce lieu devienne une maison où l’on puisse briser une situation d’isolement et où l’on se sente bien. Certains résidents du village participent à l’aménagement de la Maison Commune par un chantier solidaire et écologique.

Le règlement et le fonctionnement prennent en compte la grande diversité des publics accueillis et leur problématique afin de retrouver les conditions de la sociabilité. Les rencontres quotidiennes permanentes entre les personnes accueillies : ouvriers sur les chantiers, résidents, équipe des permanents et plus irrégulièrement : partenaires, anciens résidents, membres du CA, visiteurs … rendent ce lieu bien vivant et convivial. Ce n’est pas une micro société mais un espace d’échanges permettant une vraie valorisation de chacun. Il évite les principaux écueils que sont le repli sur soi et le sentiment de stigmatisation… Et… ça fonctionne !

En ce qui nous concerne, nous tenons un «vestiaire» de vêtements d’occasion, remis en état et présentés «façon boutique». Nous avons constaté que l’aspect commercial est très vite passé au second plan pour nos nombreux «clients». La plupart viennent maintenant ici surtout pour un bonjour, un sourire et… trouver des oreilles attentives. Ces échanges reposent sur un véritable partage, nous donnons, sans doute, mais nous recevons encore plus.

De nombreuses femmes isolées socialement, voire linguistiquement nous disent venir chez nous parce qu’elles y trouvent un espace où racisme et xénophobie sont absents et que c’est leur seule sortie, leur bouffée d’oxygène. Une femme apporte du pain marocain, une autre des pâtisseries, il y a même un homme réduit à vivre dans sa voiture qui nous donne des vêtements devenus trop petits.

A propos d’exclusion linguistique, nous ne pouvons qu’encore témoigner que la connaissance de l’occitan permet de communiquer avec certains migrants de pays latins, comme notamment cette catalane qui ne parle pas français et avec qui nous tenons des conversations émaillées de sacrés fou-rires ! Finalement les créateurs de la Maison Commune ont mis en application, sans en être conscients, les valeurs de la civilisation occitane classique «Convivéncia e paratge».

 

(1)     Coexistence, et jeu de mot sur « partatge » pour paratge, noblesse ; pris ici au sens éthique.

 

                                                              Bernadette Racouchot et Françoise Salice-Schmitt

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