adeo

N°171 – L’Inquisition pour la répression

Juil 17, 2010

Le traité de Paris, signé le 12 avril 1229 et imposé au comte de Toulouse Raimon VII par l’Église et le roi de France, est reçu en Occitanie comme un coup de massue. Parmi ses trente-deux articles, plusieurs commandent une répression implacable contre les « hérétiques », en associant tous les pouvoirs à cette lutte : le temporel et le religieux, même combat !…

 

Réprimer les hérétiques

Les choses ne traîneront pas. Dès le 24 mai 1229 une université est inaugurée à Toulouse, rue Saint-Rome, dans le couvent des prêcheurs dominicains : elle servira à former les futurs agents de l’ inqui si tion chargés d’éradiquer t oute contestation du nouvel ordre imposé, celui de l’Égl ise mai s aussi celui du pouvoir capétien. En novembre, un concile se tient à Toulouse, présidé par le  cardinal-légat de Saint-Ange — Romano Frangipani — qui est le véritable artisan du traité de Par is. Parmi le s quarante- c inq canons des décisions arrêtées, le canon 18 résume bien le but de ce concile et inaugure, après vingt ans de guerre, un si èc le de répression, de ter rori sme inquisitor ial subit par les populations d’Occitanie : « Seront considérés comme accusés d’hérésie ceux que désignera la rumeur publique ou ceux qui, sur dénonciation de gens honorables et sérieux, auront été classés comme tels, légalement, par l’évêque».

Aussitôt l’assemblée conc iliaire se transforme en tribunal pour juger des suspects d’hérésie désignés par l’évêque Foulque qui a  produit des témoignages écr its, non communiqués aux ac cusés bien entendu… On assistera même à des abjurations par peur du  bûcher. Ainsi l’ancien parfait Guilhem del Soler recevra une charge de chanoine en récompense de son abjuration : il est l ‘ancien s o c i u s (compagnon) du diacre cathare Bernard de Lamothe qui a vécu à Villemur-sur-Tarn au début du XIIIe siècle.

 

Les principales mesures du concile de Toulouse

Tout homme dès 14 ans et toute femme dès 12 ans devront prêter le serment — à renouveler tous les deux ans — de servir l’église catholique et en particulier de dénoncer toute personne (parent, ami, voisin…) suspecte d’hérésie. L’Ancien et le Nouveau Testament  sont interdits aux laïcs ; écrits en latin, leur traduction en occitan n’est évidemment pas concevable par l’Église, les populati ons  locales pouvant trouver dans les Évangiles un caractère subversif nuisible à l’ordre établi ?… La présence de tous à l’égl ise est obligatoire le dimanche et les jours de fêt es re ligi euses ; le s prêtres sont invités à rappeler plusieurs fois par an à leurs paroissiens les dispositions du conci le de Toul ouse. Les cl er cs sont exempté s d’ impôt s et l es laï cs par contre sont condamnés à leur payer les dîmes sans aucune exonération… Sur le plan militaire, il est interdit à tout homme de plus de 14 ans d’entretenir quelque relation que ce soit avec les faidits et aussi de construire un nouveau château ou de relever une forteresse démolie. De même toute femme propr i étaire d’u n châte au e t t oute veuve héri tière d’une place-for te verront leur propriété confisquée si elles épousent un faidit ou un hérétique.

Enfin les constitutions d’associations ou de conf réries sont strictement interdites, aussi bien pour les seigneurs et chevaliers que pour les bourgeoi s des villes et les paysans des campagnes… Ainsi tout un peuple s’enfonce, pour plus d’un siècle, dans une nuit   inquisitoriale impitoyable. Dorénavant, chacun devra apprendre à se taire, pire à se méfier de ses voisins comme de ses propres amis   ou de sa famille. Le moindre geste et la moindre parole pourront être interprétés comme une complicité d’hérésie, avec des  conséquences destructrices sur les personnes et sur les biens : port de croix cousues sur les vêtements pour les hérétiques cathares et d’une rouell e pour les Juifs, torture  physique et morale, prison perpétuelle, bûcher, conf iscation des biens et destruction de maisons, parents déterrés et dépouilles brûlées…

Bref, une terreur organisée que l’on pe ut compare r à cel le connu e so us l’occupati on allemande au XXe sièc le, mais qui fut, elle, de cour te durée. La philosophe Simone Weil (1909-1943) écrit, quelques jours avant sa mort en 1943, à propos de la conquête du comté  de Toulouse par la France : « On peut trouver dans l ‘Histoire des faits d’une  atrocité aus si grande, mais non plus grande »…

Quant à Henri Gougaud, il affirme : « Il fallut deux siècles pour que les Occitans deviennent français et bons catholiques. Deux siècles de gestapo. Ceux qui Malgré tout, des tensions se font sentir dans tout le comté de Toulouse, t ant contre l ‘oc cupant français que  contre l’église catholique qui se place de plus en plus, dans toute la chrétienté, au-dessus des pouvoirs politiques laïcs. Le sénéchal de Carcassonne est tué dans une embuscade près de Quillan, t andi s qu’à Toul ouse la po pulation assassine les délateurs et les « fonctionnaires » de la police inquisitor iale. Raimon VII ruse autant qu’il le peut pour ne pas appliquer les clauses du traité de Paris.

Quant aux consuls, ils défendent leurs concitoyens contre les e xcès de s frères prê ch eurs qui commencen t à dé ter rer des mo rt s suspectés d’hérésie pour les brûler sur un bûcher. Enf in les manifestati ons d’hostili té deviennent si intenses que l es maîtres de l’université Jean de Garlande, Hélinaud de Froidmont et Roland de Crémone devront qui tter Tou lo use et regagner Par i s pou r « sauver leur peau »…

Création de l’inquisition pontificale dominicaine

Constatant le manque d’efficacité des évêques d’Occitanie dans la lutte contre les « hérétiques », et les nombreuses entraves que représentent les «frontières » entre les seigneuries et les diocèses, le pape Grégoire IX confie le 20 avril 1233 à l’ordre des frères prêcheurs la mission d’éradiquer l’hérésie définitivement et par tous les moyens : l es dominicains seront désormais les seuls « juges délégués par l’autorité du Saint-Siège à l’Inquisition de la perversité  hérétique », et ne recevront d’ordre que du pape directement.

Autremen t dit , il s seront se ul s « maîtres à bord » et totalement libres d’organiser à leur guise la soumission déf initive des  populations, qui vont connaître un cauchemar insoutenable sur plusieurs générations.

Dès le 22 avril 1233, Pons de Saint- Gilles, Guilhem Arnaut et Pierre Sellan auront en charge l’inquisition des diocèses de Cahors et  Toulouse. Arnaud Cathala et Guilhem Pelhisson enquêteront dans le diocèse d’Albi, tandis que l e catalan Ferrer et Pierre d’Alès auronten charge celui de Carcassonne. C’est d’ailleurs Ferrer qui interrogera l es rescapés de Montségur après le bûcher du 16 mars  1244.

Le tr ibunal de l’inquisiti on pontif icale s’install e dans une maison de Pier re Sellan près du Château Narbonnais, sur l’actuelle place du  Salin à Toulouse. On peut visiter aujourd’hui encore la première maison de l’inquisition dominicaine qui jouxte l’anc ien rempart  romain.

Un système policier et judiciaire terrifiant

Les Dominicains mettent en place une machine policière infernale. Ils ont tous les droits en matière d’espionnage, de perquisition, d’arrestation en tous temps et en tous lieux, sur toutes les populations, du simple paysan au plus gran d seign eur , fû t-ce l e comte de Toulouse… et même sur tout le clergé. Leurs exploratores — sorte de police secrète — surveillent les conversations, et recherchent les fugitifs dans les bois, les grottes, les souterrains (les cròs ou c luzeaux) , l es châteaux et même l es églises. Ils paient des délateurs et se remboursent eux-mêmes de leurs propres frais sur le trésor public (royal ou seigneurial), sur les amendes infligées aux hérétiques et sur la confiscation de leurs biens. Sont défrayés de la même manière tous ceux qui ont assisté à un procès, à l’énoncé et à l’exécuti on du verdict. De même pour les fossoyeurs chargés d’exhumer l es squelettes de prétendus hérétiques condamnés à être brûlés… Les évêques, les curés, l es vigui ers, les magistrats, les consul s sont tenus de les aider si nécessaire. Les inqui si teurs se déplacent en général avec leur tribunal itinérant. Quand ils arrivent dans une ville ou un village, tout le monde — catholiques ou présumés « hérétiques » — peut trembler, car personne n’est à l’abri et peut perdre sa liberté, ses biens et même sa vie pour peu de chose.

L’inquisiteur demande aux curés de rassembler toute la population et se lance dans un sermon anti-hérétique, où il exhorte les uns et  les autres à se déno ncer . En général un « délai de grâce » d’une ou deux semaines est accordé pour que chacun vienne confesser ce qu’il sait ou ce qu’il est. Les plus ter ror isés le font spontanément par peur du bûcher. Ils sont alors réconciliés avec l’Église, mais doivent s’engager à dénoncer d’autres « hérétiques » pour prouver leur sincérité. L’inquisiteur peut alors démonter rapidement tout le réseau de solidarité cathare.

La procédure

Avec les informations obtenues des délateurs, l’inquisiteur dresse une liste de suspec ts qui sont convoqués quelques jours après. Chaque suspect comparaît seul, sans l’aide d’un avocat, devant un tribunal composé de l’inquisiteur, de deux religieux et d’un notaire qu i va dresser le procès-verbal de l’interrogatoire. On peut imaginer son angoisse, quand lui sont posées l es premières questions : il  ne connaît pas  de motif de sa convocation ; ni le nom de ses dénonciateurs ; ni ce que contient déjà son dossier ; ni par conséquent ce que sait ou ne sait pas l’inquisiteur…

Le suspect doit tout d’abord prêter serment de « dire toute la vérité sur luimême et sur les autres vivants et morts, sur l’incrimination d’hér ési e ». Il est tenu ensuite de confesser toutes ses « fautes », après avoir donné le nom de ses parents, conjoint, enfants, frères et soeurs… et après avoir résumé tous les faits notables de son existence. S’ il oublie certains détails liés à « l’hérésie » cathare, qui  peuvent être découverts plus tard, il risque une condamnation sévère comme parjure. L’inquisiteur complète la déposition du suspect en lui demandant des précisions qui seront notées minutieusement et uti lisées pour confondre d’autres suspects lors de cette session  du tr ibunal, ou même souvent de nombreuses ann ées après ave c l es inquisi teurs  su ivants, l es do ssi ers et f ichi ers individuels étant conscienc ieusement rédigés et archivés… Une aubaine pour les historiens !

Quand, aux yeux de l’inquisiteur, les aveux du suspect d’hérésie paraissent trop légers, celui-ci est conduit en prison pour « l’aider » à réfléchir avant un nouvel interrogatoire, parfois avec  quelques tortures physiques ou morales à l’appui… Enfin après les « aveux », le
présumé coupable est invité à renoncer défini tivement à la fréquentation des hérétiques, à abjurer la foi cathare, à combattre activement « l’hérésie » — par la délati on par exemple — et à servir l’église catholique. Vien t e nsuite assez rapidement l ‘heure de la sentence. Pour celui ou cel le qui pe rsévère dan s la foi de s « Bon s Ch rét iens », ainsi qu e po ur celles et ceux qui sont retombés dans l’hérésie après une première abjuration ( les relaps), l’affaire est entendue : ils sont remi s par l’ inquisiteur au bras séculier (car l’église catholique « qui a horreur du sang versé » n’ose pas exécuter  ell e-même les personnes qu’elle condamne…), c’est-à-dire qu’ils seront  brûlés immédiatement sur un bûcher.

Mais il arrive que certains, au pied du bûcher, demandent à abjurer : ils sont al ors de n ouveau inter rogés par l’inquisiteur qui les renvoie à la prison (sauf les relaps condamnés définitivement) ou les livre de nouveau au bûcher, s’i l estime que le repentir n’est
pas sincère. Quant aux autres suspects d’hérésie, l’inquisiteur les réintègre dans l’église en leur infligeant une pénitence plus ou moins sévère : port de croix d’infamie cousues l’une sur la poitrine et l’autre dans le dos, pèlerinages plus ou moins lointains, amendes diverses, pri son limi tée à quelques années ou bien pour la vie. Mais malheur à celle ou celui qui récidive : ce pourrait être
alors le bûcher !

Les mor ts n on plus ne sont pas épargnés. Si, au cours des interrogatoires, l’inquisiteur découvre que telle ou telle personne est  décédée « en odeur d’hérésie », elle sera déterrée, promenée  en procession dans les rues de la ville ou du village, et finalement ses  restes seront brûlés sur un bûcher. Ses biens se ro nt conf i squ és et son anc ie nne maison détruite — comme pour tous les condamnés — avec l ‘interdicti on de reconstruire à jamais sur ces mêmes lieux.

Mais le délit d’hérésie n’est pas seul invoqué par l ‘inquisition pour s’emparer des biens de la population. Ceux qui font o bstac l e au pai ement de s dîmes en faveur de l’église sont euxmêmes l ourdement condamnés, car pour l’église leur résistance à l’impôt met en pér il l’ ordre économique et social.

Les sentences sont lues lors d’une cérémonie religieuse devant une église, comme à Toulouse devant la cathédrale Saint-Étienne.  L’inquisiteur est entouré pour l’occasion des membres du tribunal et de tout le clergé du lieu et du voisinage. Leurs frais de déplacement seront remboursés avec la vente de bi ens co nf isqués au x pré ven us. Le peuple aussi doit assister à ce « sermon public » appelé « acte de foi » ou autodafé…
La haine des populations
L’inquisition s’en prendra ainsi à t oute une population vaincue, dé jà traumatisée par vingt ans de guerre de 1209 à 1229. Dans toutes  les villes et  dans les plus petits villages personne ne sera épargné : qu’il soit bon catholique o u croyan t cathare, cheval ie r, paysan ou artisan, chacun subira dans sa vie quotidienne une surveillance permanente, par un clergé tenu d’exécuter l es consignes de l ‘inqui siti on et du traité de Paris, même si certains curés se montrent solidaires de leurs compatriotes d’Occitanie…

Devant toutes les injusti ces et les cruautés commises par les tribunaux de l ‘inquisi tion, on peut comprendre la haine qui s’emparera des populations con ce rn ées, non seul ement cont re l’Église, mais aussi contre les occupants français qui sont mutuellement  solidaires.

Une haine tenace qui durera bien deux siècl es et qui engendrera sans doute, dans nos régions occi tanes, un certain  anticléricalisme récurrent.

Georges Labouysse

Ne saber mai / En savoir +

N°171 – Los 30 ans de Calandreta

Juil 17, 2010

La federacion Calandreta, a l’escasença deu son congrès, festejava los sons 30 ans deu 12 al 15 de mai de 2010, a Cap Descobèrta, dab  la tematica « La lenga d’una cultura ». Mei de 400 personas se tornèron trobar per 4 dias de talhèrs e de seradas.

Tots los qui an participat a l’istoria de Calandreta èran presents : Anna-Maria Ròth qu’inventèt aquel mot de Calandreta — un aucelon del vinhal, qui anóncia la prima de la lenga — e qu’apitèt la purmera Calandreta a Pau en 1979, mes tanben, Jaumeta Arribaud, la qui bastiguèt la de Besièrs. En se lançar dens aquesta aventura, pensavan pas, 30 ans après, que las calandretas poscan transméter la lenga i a quasi 3 000 calandrons sus Occitania tota. Calandreta qu’a demontrat qu’èra un projècte frutèc, qui respon a ua demanda deus parents e qui auhereish ua formacion de qualitat. Los efectius de las escòlas continuan de créisher, e i a la volontat de s’espandir sus lo segondari dab dejà 2 collegis a Besièrs e a Pau.

Calandreta de pertot…

Dens los « oficials » qui èran representats per la ceremonia, lo rectorat de Tolosa — Daidièr Agar — es un ancian regent de Calandrata, lo Conselh Regionau d’Aquitani — Dàvid Grosclaude — es un parent de Ca landron e lo de Mieidia -Pirenèus — Guilhèm Latruvèrsa — podeva testimoniar en tant que purmèr calandron de Pau. Per el, « Calandreta n’ei pas sonque ua escòla ont aprenem a legir e a escriure l’occitan, qu’ei un endret ont podem utilisar la lenga dab los amics e dab tot lo mond, ont aprenem a pensar en lenga noste, a aimar la vida en occitan ». Lo sistemi immersiu prepausat per Calandreta « qu’ei lo sistemi lo mei eficaç per formar locutors en occitan, capables de transméter la lenga. Que li cau perméter de s’adreiçar aus 99% de mainatges qui, en Occitania, seguisson sonque un ensenhament monolingui ».

 

Qué son devenguts los ancians calandrons ?

La situacion deus ancians calandrons qu’ei un subjècte d’estudi de la confederacion. Tot ua seria d’intervistas son previstas e seràn disponiblas sus lo siti de la confederacion . D’unes continuan d’utilizar la lenga e quitament tribalhan dab coma los qui son ara regents en Calandreta. Au contrari, d’autas ne l’utilizan pas cada dia, quitament si i a pas de chifras pel moment. Segon lo president de las  alandretas — Joan-Loís Blenet — « las Calandretas son de fogals de la vida de la lenga occitana e de sa cultura. Transmeton amb la lenga una cultura rica que devèm mai  conéisser, mai valorar e mièlhs ensenhar. » Demora donc de tribalh dens los trente ans a venir
per har sortir la lenga de l’escòla, per la portar cap aus parents. L’environament sociolinguistic a força cambiat dempuèi trenta ans, l’epòca actuala poderé estar mei dubèrta.

Claudi-Albèrt Andreta

Ne saber mai / En savoir +

N°171 – Entre centralisme e federalisme …

Juil 17, 2010

La crisi en Euròpa, l’Euròpa en crisi ?

C’es t la Grèce qui a donné la première l’alerte : le système monétaire basé sur l’Euro n’est pas un bouclier qui garantit stabilité et niveau de vie des citoyens. L’état grec, pris dans ses dépenses militaires excessives, l’a appris à ses dépens et s’est livré à une politique de casse sociale : augmentation drastique des impôts, privatisations, baisse des salaires.

La réaction dans la rue fut violente. La réaction au Conseil de l’Europe fut lente, difficile. L’Europe était renvoyée à ses limites : une juxtapos i tion d’États incapable de prendre des décisions, un parlement avec un pouvoir toujours insuffisant même après un nouveau traité constitutionnel.

Ensais per tornar inventar lo sistèma politic dens l’Estat francés

Deux logiques veulent transformer le paysage politique dans l’hexagone : l’émergence du centralisme métropolitain d’un côté et le dépassement des structures politiques de l’autre. Sarkozy 1er souhaite une réforme territoriale à son image de monarque, dernier
centralisateur d’une longue lignée, il dessine un monopole du pouvoir financier par l’État, et un renforcement de la mégapole parisienne. Plus aucun pouvoir en région, uniquement la concentration de richesse, d’emploi, de services sur quelques rares métropoles et autour, le désert, traversé par des autoroutes et des LGV. Voilà, une réforme technocratique qui éloigne toujours plus les élus des citoyens.Les partis polit iques tradi tionnels sont désaffectés. Après le Nouveau Parti Anticapitaliste, le Front de Gauche et Europe Écologie tentent une nouvelle forme de militantisme entre pol itique et citoyenneté. Fédération, coopérative, réseau,  l’écologisme politique et l’ occi tanisme pol i tique doit lui auss i se réinventer et se dépasser.

 

Una Occitania federala ?

L’assemblée générale de l’Institut d’Estudis Occitans le clamait haut et fort à Limoges début mai : nous sommes une fédération ! Le
soir, un débat avec les élus de Limoges et du Limousin, ainsi que les nouveaux élus d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées était ciblé sur la politique interrégionale pour l’occitan. L’enjeu est clair : construire rapidement un outil collectif — un office public de la langue  occitane — pour relier les régions entre elles, de l’Aquitaine à la Provence, du Limousin à la Catalogne en pas sant par le Piémont . Construire un avenir commun, respecter les différences, mutualiser les initiatives sont des objectifs pour notre territoire. Unie dans la
diversité : pour l’Europe et pour l’Occitanie ?

Guilhèm Latrubèssa

Ne saber mai / En savoir +

N°178 – Jean Marie Pelt, les valeurs d’un écologiste

Juin 17, 2010

Nous avons eu le plaisir de rencontrer Jean Marie Pelt à Gaillac juste après une confé rence sur les valeurs de l ’écologie.  Ethnobotaniste, auteur de nombreux livres, chro niqueur radi o réputé, c’ est un érudit mal ic ieux et bienveillant qui a bien voulu répondre à nos questions pour les lecteurs d’Occitània-Volèm viure al país.

Occitània : Pensez-vous vraiment que l’écologie est en train de changer notre société ?
J.M. Pelt : Vous savez, on peut dire qu’aujourd’hui, à l’heure où nous parlons, deux univers complètement étrangers l’un à l’autre se côtoient. D’un côté vous avez la technologie, la science, qui produit des pest icides par exemple. C’est en quelque sorte notre monde et il est en train de disparaître peu à peu. L’autre univers c’est celui des  » agro-bios  » qui utilisent les produits naturels de façon plus ou moins empirique. Le problème c’est que la recherche scient ifique ne s’est pas intéressée à ces méthodes. Je suis en train de travailler
sur les associations bénéfiques entre plantes. Je suis allé rencontrer mes collègues de l’INRA : aucune recherche n’est menée sur ce sujet ! Mais je suis optimiste.

En 2030 l’Europe interdira probablement les principaux pesticides actuels : l’histoire est en marche.

 

— Vous pens ez que le s mentalit és sont en tr ain d’évoluer ?
— J’ai étudié l’évolution du rapport homme/nature au cours de l’histoire. Je distingue trois grandes périodes. De la fin de l’antiquité jusqu’au moyen âge, la nature est perçue comme admirable. Pendant cette période, tout le monde est croyant et la nature est belle car elle est le reflet du créateur. Plus tard au moment de la Renaissance, Descartes marque un tournant : selon lui, les hommes sont les maîtres et possesseurs de la nature. C’est le début de l’exploitation de la nature qui est perçue comme un réservoir dans lequel on peut
puiser. Alors on s’est mis à consommer, à vider le réservoir et à produire des déchets. Avec Darwin et la théorie de la sélection naturelle, on a franchi un cap supplémentaire : la nature c’est la loi du plus fort. La nature est alors vécue comme  » méchante  » . Cette
vision s’est propagée et elle s’est diffusée dans d’autres théories. Marx y a vu un modèle de la lutte des classes. Les libéraux la libre concurrence… Le monde s’est engagé à fond dans toutes sortes de compétitions, guerre économique, conflit social, combat politique…
Enfin depuis quelques années nous prenons conscience que nous sommes responsables de l’avenir de nos enfants. Descartes s’est trompé : l’homme ne maîtrise pas toute la nature, nos enfants auront-ils une vie aussi  » bonne  » que la nôtre ? Pas sûr du tout !

— C’est une question très politique…
— Avez-vous remarqué les mots employés en politiqu e ? On parle de  » combat politique « , de  » b a t a i l l e électorale « , de  » campagne électorale « , comme au temps de Napoléon ! Je trouve que c’est l’honneur de l’écologie de montrer qu’il n’y a pas que la compétition mais aussi la coopération. C’est avec la solidarité une des valeurs clé de l’écologie.

— La solidarité, tout le monde en parle !
— La solidarité entre générations par rapport à ce que nous allons laisser à nos enfants est vraiment une valeur de l’écologie. Un autre grand problème de notre société c’est l’écart entre les plus riches et les plus pauvres qui ne cesse de croître. Les riches gagnent toujours plus d’argent. Pour quoi faire ? Acheter u  4×4 encore plus polluant ? Une autre valeur de l’écologie est la sobriété. Qu’on arrête de nous bassiner avec la vie des milliardaires et tout le  » bling-bling  » qui va avec !

— Quel est le message le plus important que vous souhaitez faire passer dans vos livres, vos conférences…
— Je pense qu’il faut retrouver la convivialité entre humains et monde vivant. Ne plus se comporter en brutes qui maltraitent la  nature. Les valeurs de l’écologies ont aussi celles des grandes spiritualités : sobriété, solidarité, coopération, équité. Nous avons surtout besoin d’aimer et d’être aimé. En résumé, je dirai qu’il faut passer de la civilisation du dollar à la civilisation de l’amour !

Propos recueillis par Hugues Jourde.

Jean Marie Pelt a écrit de nombreux ouvrages. Nous vous conseillons  » L’écologie pour tous  » aux éditions du Jubilé. Cet ouvrage pré sente sous la forme d’un entretien l es grandes problématiques de l’écol ogie, en élargissant la réflexion à un véritable humanisme trop souvent oublié.

Ne saber mai / En savoir +

N°171 – Condamnation de l’acte de guerre d’Israël

Juin 7, 2010

Le Partit Occitan condamne l’acte de guerre contraire au droit international de l ’armée israélienne contre la flotille civile qui apportait vivres et médicaments aux populations de la bande de Gaza.

La réaction disproportionnée de forces spéciales contre des civils , causant de nombreuses pertes humaines, aggrave les risques d’extension des conflits au Proche Orient et repousse une nouvelle fois les tentatives de règlement politique.

La faiblesse internationale face aux efforts de paix, l’absence d’une initiative européenne en leur faveur, ont favorisé l’escalade actuelle. Les prises de positions conjoncturelles des responsables du gouvernement français s ont sans rapport avec la gravité d’une
situation prévisible.

Le Partit Occitan appelle à lever totalement le blocus de Gaza, à sanctionner l’armée israélienne et à suspendre les accords de partenariats économiques entre l’Union européenne et Israël. Nous soutenons tous ceux qui, en Israël et en Palestine, agissent avec le camp de la paix, pour parvenir à une solution poli tique permettant l’existence réelle d’un État palestinien.
Poc

Ne saber mai / En savoir +

N°171 – PARUCION : « Cèrcas I » de Sèrgi Viaule

Mai 17, 2010

Per passar una vesprada d’estiu a l’ombra de la lenga nòstra : « Cèrcas I » de Sèrgi Viaule
Aqueste recuèlh es un florilègi, una seleccion, de tèxtes que son ni poèmas, ni poës ias. Se ca l pas enganar sus la merça, se merça i a.
Nimai se mesprene. Se tracha just de qualques mots apertierats per tr adus ir, un gredon a la man, d’unes sent its. S on pas que la
ma teria lisa cion d’esmòugudas qu’an pas res d’extrà -ordina ri. Segon lo cas, cada pèça es estada escricha tot d’una o foguèt laboriosa
a espelir. De cap de biais an pas de pretencion literària, jamai de la vida . Son la vida . Son pas qu’escriches espelhandrats, ni mai,
ni mens. Son paraulas getadas al vent. Son venguts, al bestorn d’una carrièra , d’un eveniment ma i o mens aürós o d’una randura al fin
fons del campèstre. Son de las quatre sasons, emai venon, benlèu, de pus luènh. Se s on impausat coma l’amor e la mòrt ; coma la
pluèja o lo bèl temps. Espeliguèron a miègjorn o a mièjanuèit. A la raja del solelh o al clar de luna. Aqueste recuèlh es un florilègi,
una seleccion, de tèxtes que son ni poèmas, ni poësias…

Colleccion « Escriches literaris» ;
64 paginas ; format A5
Prètz : 6,10 euros franc del mandadís
(chèc a l’òrdre de « ADEO »
D e comandar a : ADEO B.P. 28 81370
Sant Sulpici la Punta

Ne saber mai / En savoir +

N°171 – Occitània e Aligança Libra Europèa : Autonomia !

Mai 17, 2010

Que son mei de dètz annadas que tr ibalhi per l ‘Aliança Libra Europèa (ALE) a Brussèlas e, desempuish 1999, las causas qu’an hòrt cambiat. Que avançam cad dia un pauc mei, e donc qu’ei necessar i de har un bilanç de temps en quan. Non pas sonque peu plaser d’amui shar qu e se bolegam, qu’ èm en tenuts, qu’èm actius, me s tanben entà préner lo temps de somiar a l’Euròpa que volèm. E que’ns cau plan avisar que l’Euròpa deus Pòbles que defenem n’ei pas a man.

En 2009, las eleccions europèas que son estadas ua escaduda per l’ALE, e mei especiaument, per Regions e Pòbles Solidaris (R&PS). Vint ans après Max Siméoni, Francés Alfonsi (PNC), en tot ben ef ic iar de l’acò rdi ecolo gi stasautonomistas a l’entorn de Euròpa Ecol
ogia, qu’entrava au Par lament europèu. Deputat de l’euro- circonscripc ion « sud-èst”, e ad aqueste títol elegit deus Occitans, deus Còrses e deus Savosians, que podetz comptar sus eth per defén der l’ en sems deus dret s de las minor i tats en França ! Com digó Maurits Coppieters a perpaus de Max Simeoni en 1989, Francés Alfonsi qu’ei lo « vòste deputat »!

Vint ans après, Francés qu’ei au Parlament europèu acompanhat de dus Escocés, d’ua Gualesa, d’ua Flamenca, d’un Catalan, e d’ua Letona, qu’ei a díser que son 7 deputats de l’ALE que representan haut o bai sh quaranta parti ts dens 19 Estats membres de l ‘ac tuau Union Europèa (27 Estats). Aquesta solidaritat, qu’ei la nosta fòrça!

Lo Partit Occitan, e en tot purmèr lo son cap Gustau Aliròl, qu’a tostemps celebrat aquesta solidar itat en çò de R&PS, e a donc un ròtle deus exemplars dens l’ALE. Que sembla donc logic que l’ALE e sia solidari en retorn. Quauquas setmanas a, las el ecci ons regionaus que confirmen l’interès de la pe rse guida de l ‘amassada Euròpa Ecol ogia peu Part it occ it an. En tot utilizar au maxímum las  solidaritats en çò de R&PS, shens oblidar l ’empara regionau deus militants shens qui arrés n e seré possible, que son donc cinc
conselhèrs regi onaus qui son estats e le gi ts pe u POc . Qu’ ei ua re sult a importanta, que torna dar lo POc dens l ‘escaquèr nacionau f rancés e que va perméter d’esprovar las solidaritats enter- regionaus, que sia autan per la l enga e cul tura occitanas (que sabem
plan que de poli ticas ver tadèrs per l’occitan que son necessàrias) com per d’autes punts, com l’amainatjament de u t er ri tò ri , la re local izac io n de l’economia,…

Pe r t ornar a Eu rò pa Eco logia, pr’amor uei aquesta estruc tura qu’ei t ota refl exi on suu son aviéner , que po dem díser que pe ndent las dètz annadas passadas, los nostes partits qu’an abonit a l’ecologia politica deus Verds, en los har integrar lo concèpte de diversitat culturau e l ingüistica. Qu’ ei don c normau d’e star au Parlament Europèu en lo medeish grop, en tot respectar las nostas particularitats per l’autonomia de las regions en Euròpa, en ua Euròpa que damora a bastir.

Pr’amor, après detz ans de conflictes  insti tuc i onaus, l’Euròpa se deu de tornar trobar las soas arraditz : un projèc te pac ific que l’economia ei en purmèr ua manièra d’arribar a la patz, e no n pas un tèrmi . Las decenias passadas qu’an dat pròvas, au contrari,
que l’Union Europèa a adorat un vetèth d’aur e desdei shat los sons ide au s immat er iaus. La c r isi f in an cè ra e economica mondiau, com las tensions que engendrè desempuish tostemps, que sosl inhan l’urgéncia d’ua cooperacion economica, mes subretot politica, cultura e sociau. Que caleré, uei, qu’a la mar ca ecol ogica e s’ajusta la marca culturau, per cal cular e agir sus las consequéncias de  l’Union Europèa cap a las identitats, las culturas e las lengas d’Euròpa, non ?

L’Aliança Libra Europèa qu’auhereish la possibilitat de har ponts entre las culturas e, en aquesta qualitat, que favoriza la comprenença  mutuau entre l os pòbles. Las experiéncias de cadun que son estudiadas e, a cops, adaptadas sus d’autes terri tòr is. Los par ti ts de l’ALE au poder, com lo SNP (Par tit Nacionau Escocés), l’ERC (Esquèrra Republicana de Catalonha) o lo Plaid Cymru (País de Galas) qu e so n ua faiçon de tirar los en dificultat de cap  au som. Aquò explica perqué l’ALE a iniciat un dialògue com d’aver ligams dab los  estatòts com l’Estonia, micro-Estats com Andòrra o islas com las Feröe o l’Isla de Man.

Que sia dab o shens Estat, los pòbles an drets, que hòrt sovent e son oblidats peus estats centralistas mei grans. L’Estat francés qu’a bona man ad aqueste joc! L’escaduda de R&PS, e deu Partit Occitan en particularament, au moment d’aquestas regionalas, qu’ei ua pròva de l’expression de la pression po pulara en favo r de ua Re pu bl ica auta, que sia mei pensativa deus territòris e de las culturas.

Que tempti la jòga que, au cap de las cinc annadas a viéner , la lenga occitana e coneisherà ua progression de las importantas en Occitània gràcia aus vòstes elegits, e en Euròpa, dens la dinamica de la reconeishença deu catalan. E un dia, amics, la le nga vòsta e serà uti l izada au Parlament europèu a Brussèlas, com dilhèu, que l’utilizaratz en los conselhs regionaus. « N’ ei pas de pensar », ce credèvan los Gualés, los Catalans, los Bascos, los Galicians,… E totun, uei, l’UE qu’utiliza 23 lengas oficiaus, dab un estatut quasi-of iciau peu gualés,  catalan, basco, gali cian.

Lavètz, au tribalh !

Au cò p qui vien, a l’Un iversi tat d’Estiu de R&PS a Moans-Sartos, en Occitània

Günther Dauwen

Director de l’ALE

Günther Dauwen

Ne saber mai / En savoir +

N°170 – Une paix diabolique

Mai 17, 2010

Ai ! Tolosa e Proença
e la tèrra d’Argença,
Besièrs e Carcassei
com vos vi e co’us vei!
Hélas! Toulouse e t Provence / et la
te r re d’Argenc e ,/ Bézi e rs e t
Car cassé s, / comme je vous vis et
comme je vous vois !
Bernard Sicard
de Maruéjols (1230)

Devant l’accablement des populations et le découragement  de ses alliés, Raimon VII donne les pleins pouvoirs à l’abbé de Grandselve le 10 décembre 1228, pour négocier un accord de paix avec le médiateur désigné par Blanche de Castille, sur la base des grandes lignes ébauchées à Baziège quelques semaines auparavant.  À savoir : réconciliation de Raimon VII avec l’Église s’il s’engage à lutter contre l’hérésie ; conservation de ses titres et de ses  possessions s’il reconnaît le roi de France comme suzerain.

Rencontre à Meaux

Les deux parties se réunissent à Meaux en janvier 1229 et le comte de Toulouse signera là un document préliminaire dont les clauses
lui paraissent acceptables. Or, cette assemblée de Meaux va se transporter à Paris « pour que tout se terminât en pré sence du roi », rapporte le chroniqueur Guilhem de Puylaurens.

Le jeudi 12 avril 1229, sur le parvis de Notre-Dame, devant tous les grands seigneurs de France et ceux des pay s occitans , on lit à
Raimon VII les 32 articles du traité revu et corrigé par Frangipani. Et là, stupéfact ion ! Des phrases du document de Meaux ont été cyniquement remaniées, d’autres rajoutées… si bien que les conditions de paix signifient à présent une véritable capitulation, voire l’annexion du comté de Toulouse.

Réécritures

Ainsi par exemple, dans le document de Meaux il est prévu le ma riage de la fille du comte, Jeanne de Toulouse, avec un frère du roi et il est écrit qu’elle héritera des terres du comté à la mort de son père, et que « si notre susdite f ille mourai t avant nous sans enfants, et que nous ayons d’autres f ils nés de légi time mari age , le di oc èse de Toul ous e leur ser ait dévolu ». Or , dans le tra ité de Par is, changement « de décor ». Ce n’est plus Jeanne qui héritera , ni s es autres frères éventuels. On y lit: « Après notre mort, Toulouse et le
diocèse de Toulouse seront au frère du seigneur roi qui aura épousé notre fille et à leurs seuls descendants. » Et plus loin : « Si notre fille mourait sans avoir eu d’enfants du frère du seigneur roi, que Toulouse et le diocèse de Toulouse reviennent de même au seigneur roi et à ses héritiers, en sorte que, quoi qu’il arrive, Toulouse et le diocèse de Toulouse reviennent à notre mort au seigneur roi [.. .] ». Comme on le voit, tout a été bien ficelé… sur la route de Meaux à Paris ! Le seul côté positif de ce traité détestable pour les occitans, c’est que Raimon VII est reconnu comte de Toulous e par le ca pét ien et l’Église, mais c’est en échange d’un engagement lourd de conséquences:  une lutte impitoyable contre les « hérétiques »; le mariage de sa fille avec un frère du roi ; et surtout la reconnaissance du frère du roi ou du roi lui-même comme seuls héritiers du comte à sa mort. Ce qui signifie à terme une annexion pure et simple des terres occitanes par la France capétienne.

Le roi de France comme suzerain

De plus, Raimon VII doit reconna ître le roi de France c omme suzerain, alors qu’il était totalement indépendant du r oyaume jusque là. Il est contraint aussi de rémunérer les professeurs parisiens d’une université créée à Toulouse le 24 mai 1229, qui sera chargée de
former les cadres de la répression politique et catholique, à la fois donc contre les hérét iques reconnus, et aussi contre toute contestation de la popula tion oc citane suscept ible de remettre en cause l’ordre nouveau établi par Paris.

L’humiliation

Après la lecture publique et la signature de ce traité de la honte, Raimon VII, comme son père en 1209 à Saint-Gilles, sera humilié
devant toute la cour de France : « en chemise et en braies, les pieds nus », il sera conduit par le légat du pa pe devant le grand autel de
Notre-Dame pour entendre levée son excommunication… À travers le comte de Toulouse, c’est tout le peuple occitan qui est traîné à terre, bafoué, trahi, humilié et bientôt colonisé. Les auteurs de l’Histoire du Languedoc, pourtant bénédictins, écriront au début
du 18e siècle : « On voit par ce traité que les principaux instigateurs de la guerre cont re Raymond, songeaient bien moins à s’assurer de sa catholicité qu’à le déposséder de ses domai nes et à s’e nrichir de ses dépouilles. »

 

La forfaiture de Rome

Et le troub adour toulousain, Guilhem Figueira, contemporain des fa its , crie sa colère contre l’Église : « Rome, si grande est votre forfaiture Que de Dieu et se s s aint s plus personne n’a cure Votre règne est maudit, Rome fausse et parjure C’est par vous que se fond
S’étiole et se confond Ici-bas toute joie. De quelle démesure Accablez-vous Raimon ! »

 

L’annexion

Avec ce traité de Paris , suivi d’un acte semblable à Saint-Jeande-Verges pour le comté de Foix et précédé d’un « hold-up » sur  l’ancienne vicomté Trencavel, le roi de France a b ien annexé toutes les terres occitanes de la Garonne au Rhône. Il a ccède a insi pour la première fois à la mer, et c’est, à n’en point douter, le début des annexions de territoires et des colonisations par la France autant en
Europe qu’au delà des mers, une politique qui se poursuivra sans interruption jusqu’à nos jours par l’État français monarchique,  bonapartiste ou républicain.

Georges Labouysse

Image1

Ne saber mai / En savoir +

N°170 – Pour une politique éducative de co-civilisation

Mai 17, 2010

Martine Boudet et Florence St-Luc font part de propositions alternatives pour la formation des enseignants.

 

La crise de l’Ecole et des IUFM alimentée par le dispositif néolibéral

La mort en janvier 2010 d’Akim, él ève assassiné dans l’enceinte d’un établissement scolaire qui avait été pourvu peu au paravant de portails  détec teurs de métaux, repose en des termes cruels le problème de l’inadaptation croissante du système scolaire aux évolutions et aux crises de la société.
Cette inadaptation est renforcée par l e di sposit if des « ré fo rmes » néo – l ibé ral es, imposées en mati ère de formation des enseignants et d’éducati on ; comme les person nel s de l ‘académie de Crét eil , la grande majorité des professionnels et de leurs organismes représentatifs estime en e ffet qu’une te ll e pol itique ren d et rendra plus difficile encore l’exercice de leur métier.
Dans ces condi ti ons, quel le s proposi tio ns alternatives formul er, quels leviers stratégiques pouvons-nous acti onner pour (re)mobili ser formateurs, éducateurs comme usagers de l’École sur un autre avenir possible ?
Une perspective de cet ordre ne pourra se co ncrétiser qu’en foncti on, entre autres, des deux princ ipes suivants, celui de l’harmonisation des objectifs de formation et d’éducation et le principe complémentaire, qui consiste à associer tout aussi systématiquement les questions programmatiques et institutionnelles. Ainsi, en contextualisant davantage le cadre de leur exerc ice et en é vi tant l e pi ège du corporati sme gestionnaire dans lequel menace de les enfermer le système actuel, les IUFM po ur ro nt reconqué ri r au près de l ‘ opin ion publ ique l e l eadership intell ectuel et moral qui doi t être le leur.

 

Le système éducatif français : entre principe d’égalité et différenciation culturelle et individuelle

Une réhabili tati on du système ne pourra pas faire l’économie d’un retour sur l’histoire de l’institution et sur son ambivalence, dans le cadre et de l’Étatnation et du système néo-libéral propre à la sphère oc cidentale et européenne. Au moment o ù l es pouvo irs publ ics
échouent à définir l’identité nationale par opposition aux réalités culturelles de l’immigration, i l faut rappeler la  double tradition française, faite à la fois de progressisme social et d’autoritarisme impérial. Dans son processus de démocratisation, l’École républicaine  s’est voulue égalitaire, sans vraiment parveni r à réaliser cet objectif. Malgré des acquis historiques, le système éducatif f rançais reste inéquitable car trop uniforme. Le s rai sons de ce passi f sont à rechercher dans les structures anthropologiques de notre mode républicain et dans ses ombres au tableau, à savoir le centralisme qui confine, en l’absence de contrepoids suffisants, à un unitarisme autoritaire de même qu’une citoyenneté individu ell e qu i laisse de la même manière trop peu de place au dialogue des cultures, de quelque nature qu’elles soient (d’origine, de genre…). Ce double effet pervers de notre tradition politique et éducative explique en grande parti e la montée en pui ssance d’un technocratisme gestionnaire, qui sévit souvent au détr iment d’al ternatives
complémentaires et d’expérimentations vivantes et autonomes. Ce phénomène institutionnel tend à se manifester par miméti sme  sans le s col lec ti fs de formateurs, d’universitaires et d’enseignants dans lequel manque un débat d’idées novatr ices, d’ordre épistémologique et programmatique.

En France, la différence culturelle et l’hétérogénéité de niveau sont généralement vécues comme négatives, al ors que dans ce rt ains pays, ce s  fact eurs obje cti fs sont reconnu s et utilisés comme positifs ou à positiver, sel on le cas. Ainsi, le rayo nnement actuel de l’Espagne démocratique doit  be au co up au dialogue des communautés autonomes et de la capitale, les diverses langues-cultures du  pays étant largement réhabilitées à l’École et dans les médias. Dans le même temps s’y développe la co-éducation (« co-educación ») depuis plus de 20 ans au niveau de l’enseignement : ce courant propose réflexions et actions pour lutter contre la violence de
genre e t l es manifestati ons du machisme. Dans les pays scandinaves, c’est la pe rso nnali sati on, c’ est-à-di re la construction de l’élève comme sujet, qui est à l’honneur, cette démarche s’adressant à tous les élèves, quel que soit leur niveau. « Ainsi, l’intégration  individualisée  est associée à la fois à un niveau éducatif général élevé , une proportion d’élèves en difficulté faible, et une élite
développée. C’est de plus le seul modèle de gestion de l’hétérogénéité capable de limiter les inégalités scolaires générales et d’or igin e sociale . » (Mons, 2009, p.169).

Mai s l ‘espri t j acobin a du mal à envisager une vraie différenciation des apprentissages de même qu’une réelle décentralisation  culturelle. Associé au dispositif néolibéral européen, ce passif  histo riqu e co nduit désormais à undépérissement certain de  l’organisme  éducation nationale, et cela au r isque de former une médiocratie conformiste car ego-ethnocentrée. Ce central isme autoritaire s’enracine dans la gestion de la corporation enseignante et de ses relations avec la hiérarchie et avec les publics scolaires et se maintient du fait de la féminisation croissante du métier, synonyme de vulnérabilisation en l’absence de pr ise en compte de ce
paramètre dans la gestion des ressources humaines.

 

Depuis les réformes de l’après-mai 68, la participation des parents d’élèves et des élèves et à la vi e des établissements scolaires s’est accompli e en effet sans que les enseignants ne bénéf i ci ent eu x-mêmes de prérogative s élargies en matière de création et d’auton
omie didactique et pédagogique. Censée s’inscrire dans un processus de démoc ratisation interne, la formation continue n’a pas vraiment donné lieu à l’ émulation que l’on pouvait légitimement en attendre, dans le contexte de la c rise scolaire notamment. Là est
l’une des raisons de la désaffec tion de l’opinion publique à l’égard des IUFM, trop détachés des réalités concrètes et du quotidien de l’École. Par ai ll eurs, pr is en étau ent re l ‘immo bi li sme h iérarchique et une pression accrue du terrain parental et juvénile marqué par la peur de l’avenir professionnel et l’angoisse du chômage, tout comme par la perte des repères traditionnels, le métier  d’enseignant a  lui-même perdu en termes d’autorité intellectuelle et morale. Avec la montée des incivilités et des violences dans les
établissements scolaires, l’évaluation systématisée des enseignements et la judi ciari sati on des in cident s de parcours sont les effets logiques d’une t el le poli tique de format ion et d’éducation. C’e st dans ce cadre tendant à devenir un car can que la normativité managériale s’impose trop sou vent désormais, au détriment de la loi et des principes républicains : la course aux « contrats d’ objec tifs » et aux compétences en matière de compétitivité et d’adaptabilité aux marchés, la transparence informatique devenue inquiétante du métier d’enseignant sont censées se su bsti tu er à une dynamique de groupe d’ordre épistémol ogique, sur l’actualisation des finalités de la formation et de l’éducation.

Pour contrecarrer cette dér ive c lientél iste et populiste, s’impose donc d’assumer le recours à des démarches délibérément différenciées et dial ogiques en matiè re de formation comme d’éducation.

Économie de la connaissance vs interdisciplinarité

La menace de disparition des IUFM ne peut être compr ise non plus sans référence à la di te « économie de la connaissance » qui remodèle su r le standard euro-oc cidental le dispositif  global de recherche, de formation et d’enseignement. La mastér isation de
l’ enseignement à l’Université s’inscrit en effet dans une démar che de marchandi satio n des savoi rs, do nt le s savoirs professionnels, ceux-ci pouvant ê tre di spensé s égalemen t par de s instituts privés. Cette mesure s’ajoute à la « libé ral isati on » en in terne de
l’Université (via la LRU), qui fragilise cette instituti on dans ses missio ns républicaines ; en plus des centaines d’instituts privés à caractère industriel et commerc ial déjà subventionnés, la création des pôl es régi onaux de compétitivité et des pôles d’excellence
(plan Campus) renforce l’ impac t des mar chés et de l’industrie, la constitution de l’ANR et de l’AERES gérés par l’exécutif s’inscrivant quant à elle au détriment du CNRS, ce pôle central et jusque là relativement autonome de la recherche nationale étant lui-même soumis à une contrac-tualisation étroite et mercantile de ses objectifs; dans ce contexte de col lusion croi ssante des institutions de l’État et des intérêts pr ivé s, la di spar i tio n de s IUFM s’apparenterait à la mise en berne du se rvi ce publ ic de fo rmati on et
d’éducation. Ce même phénomène se manifeste au niveau de l’École, de plus en plus concurrencée par des réseaux
d’ ét abl issemen ts pr ivé s e t/ou confessionnels bénéficiant du soutien de l’État.

Par une refonte complète du dispositif institutionnel, l’objectif programmatique pr inc ipal réside dans le renforcement de la rentabilité des disciplines marchandisables dont les sc iences et les techniques et, pour ce faire, à une int erdisc ipl in ar i té sél ec tive de ce champ. Par contrecoup, ce processus conduit à la marginalisation proportionnelle des sci ences h umain es et sociales, des humanités, des Lettres et de s Arts, considérés comme moins rentables et inadaptés au marché de l’emploi et dont le mode de fonctionnement est en co re isol é et peu en réseau. Un tel déséquilibre entre les ch amps disc ipl inaires et e ntre le s cul tures de genres correspondants ne
peut que conduire à la régression de la culture humaniste et de sa transmission aux nouvelles générations.

Ce passi f int erdisc ipl inaire se cristallise sur la formation des enseignants : la majorité des professeurs des écoles provi ent du deuxième champ disciplinaire préci té. Par aill eurs, la professi onnal isati on des enseignants nécessite le recours aux sc iences de l’éducation, psychopédagogie et didactique , dont l ‘aveni r e st égal ement menacé.

 

Martine Boudet

auton492-beb05 

et Florence St-Luc

photo
(à suivre)

Ne saber mai / En savoir +
Le site utilise des cookies pour son bon fonctionnement. En poursuivant l'utilisation du site, vous acceptez cette utilisation des cookies.
Accepter