La future loi sur les collectivités sera-t-elle audacieuse ? On craint
que non. Le centralisme a depuis longtemps créé des sujets et pas
des acteurs. Les décentral isateurs seront-ils assez forts ? Et de
quelle nature sont-ils ? Quelles sont leurs motivations ? Si elles ne
sont qu’économiques, ça n’ira pas loin. Pour être fédéraliste, il faut
avoir une certaine idée de la démocratie
Beaucoup d’espoirs qui peuvent créer beaucoup de déceptions !
Tel est le résumé que l’on pourrait faire de la situation dans laquelle nous nous trouvons à la sortie de l’été face à la future loi sur les collectivités. Les rumeurs les plus diverses c ourent .
» Ce sera audacieux ! » disent les uns. » Ne vous faites pas trop d’illusions disent les autres ! « . Qui croire ? S’agira-t-il d’une décentralisation timide, d’une vraie régionalisation ou ne se passera-t-il rien ? Dans les rumeurs, c’est plutôt le pessimisme qui domine.
Dans les commentaires qui sont faits dans les couloirs des diverses universités d’été et autres réunions du genre, ce n’est pas mieux. C’était un peu l’état d’esprit de l’UE de Régions et Peuples Solidaires. Chacun espère mais tous craig nent que les vieux démons ne soient les plus forts. Avant même qu’un texte soit prêt, on établit ça et là la liste de ceux qui sont de vrais décentralisateurs et la liste des autres, de ceux qui trouvent toujours une bonne raison pour tout laisser en l’état et à l’État.
Heureusement, peut-on dire, la droite avait prévu et fait voter une réforme des collectivités tellement mal fagotée et tellement critiquée par la gauche (et même pa r une partie de la droite), que l’on est obligé aujourd’hui de faire quelque chose. Mais que sera ce quelque chose ? Dans les couloirs des collectivités, dans la bouche de certains responsa bles s oc ialistes qui ont rencontré des personnalités bien placées, dans les propos de ceux qui sont allés à la rencontre des socialistes à La Rochelle, il y a des doutes.
On parle des réticences de l’administration centrale qui déteint sur les ministres en place et leurs cabinets. On évoque les blocages qui naissent rien que d’évoquer de f utures r ég ions qui auraient des pouvoirs nouveaux et qui prendraient des décisions quipourraient contraindre les autres collectivités à réduire leur voilure. On entend les c umulards , part iculièrement ces élus à deux têtes (conseillers généraux et régionaux) prêts à abandonner celle des deux collectivités qui n’aura pas le vent en poupe. Tout est ouvert Tout est ouvert. Mais du côté des régions, on fait preuve d’optimisme, à commencer pa r les présidents des régions qui rêvent d’une vraie régionalisation. Peutêtre n’est-ce que du rêve.
Qui osera frapper du poing sur la table pour que la banque publique d’investissement soit vraiment régionale ? Qui dira au département qu’il doit s ‘effacer ? Qui donnera aux régions ce pouvoir indispensable en matière d’énergie, de rénovation de l’habitat, de protection de l’environnement, d’urbanisme, de transports ? Il faudra du courage et une capacité à être impopulaire parmi les responsables de l’a dministrat ion d’État et parmi certains élus départementaux. Jean-Marc Ayrault sera -t- il l’homme de la situat ion pour imposer cela ? François Hollande prendra-t-il assez de distance avec ce qu’il fut, à savoir président de conseil général ? On verra, mais on sait aussi que la volonté de quelques uns ne suffira pas. Il faut aussi du courage à la base c’est à dire qu’il faut des élus locaux qui ont envie de prendre des responsabilités.
Le système centralisé n’a pas à ce jour eu la f aculté de cr éer cet te nouvelle classe politique. Il n’est d’ailleurs pas programmé pour cela mais bien pour le contraire. La prime aux sujets mais pas aux acteurs ! Reste aussi la question centrale de la fiscalité. Pas de pouvoir sans argent, pas d’argent sans impôts, pas d’impôts sans loi sur la fiscalité. Pas de démocratie sans responsabilité des élus face aux citoyens à qui on demande à payer l’impôt. Là aussi il faudra du courage et de la volonté d’innover. Le parti ma joritaire es t sujet aux turbulences. Il y a de vraies envies de régionaliser mais il y a aussi beaucoup de jacobinisme.
Puis, il y a La Crise. C’est elle que l’on invoque à chaque fois que sur ce sujet de la régionalisation on cherche des prétextes pour ne pas avancer. L’État seul pilote serait plus rassurant ? Alors que justement les résultats à ce jour tendraient à prouver qu’il serait bon de changer la recette. Mais le mal est profond. Pour certains, la régionalisation, une nouvelle répartition du pouvoir c’est comme un peur du vide. De nouvelles collectivités ? Quant à la question de créer de nouvelles collectivités c ‘es t un thème qui n’es t pas vraiment présent dans les débats en dehors de ceux qui ont eu lieu à Biarritz à l’Université d’Été de RPS. Certes on y a entendu une sénatrice socialiste dire que tout était possible et qu’il fallait que les élus soient unis pour obtenir la collect ivité propre au Pays-Basque.
Les décideur s auront auss i besoin d’une bonne dose de courage pour pouvoir tenir cette promesse ou pour faire une Bretagne réunie ou encore une Savoie et une Catalogne. Il faudra un peu d’habileté (moins que du cour age) pour ne rien faire en ce domaine. Et on a déjà v u comment c ela pouv ait fonctionner à d’autres époques. On le voit tout est ouvert.
C’est donc le moment de dire et redire que nous avons des dizaines d’années de retard en matière de régionalisation. Il faut savoir que nous entendons des décentralisateurs — qui semblent être nos alliés — mais qui ne comprennent que la vision économique de la décentralisation. La décentralisation c’est un bon coup pour le développement des PME ! Et on cite l’Allemagne avec s es entreprises moy ennes exporta – trices, innovantes et capables de fixer sur le territoire des populations qualifiées.
Comme si l’Allemagne n’était f édérale que pa r la volonté de ses patrons et de ses syndicats. Puis il y a ceux qui comme nous, les régionalistes et les autonomistes, ajoutent à cette vision économique une dose de politique et une dimension historique, linguisti-que et culturelle.
David Grosclaude