Triste bilan

La crise interne de l’UMP signe un nouvel épisode de la recomposit ion r épublic aine. Pa rt i-Éta t reconfiguré en 2002 par les barons du gaullisme et de l’oligarchie néolibérale, il a été l’ins trument de l’aventure sarkozyste, version dite décomplexée de la droite française et européenne.

Flirtant avec l’extrême-droite elle-même dédiabolisée, il a géré une décennie de reflux systémique, au détriment des catégories populaires, du monde de l’immigration et des peuples du Sud.

À la longue liste des lois antisociales et hostiles aux droits des migrants , il faut ajouter les délits politico-financiers: la justice peine à instruire et sanctionner les affaires résultant d’une gouvernance qui a souvent confondu intérêt génér al et intér êts partisans et privés. En particulier dans le domaine opaque de la politique militaire et des trafics d’armement (af faire de Kar achi). Pas moins de deux pr ésidents condamnés ou soupçonnés de malversations, sans parler de certains de leurs ministres.

À ce bilan, il faut ajouter les c rimes néo- coloniaux. Michèle Alliot-Marie, ancienne présidente de l’UMP, soutenait la dictature de Ben Ali, au moment où le peuple tunisien ouvrait une nouvelle page de son histoire et de celle du monde arabe. Au lendemain de la réélect ion de Jacques Chirac en 2002, après le coup électoral du Front national, a démarré le harcèlement militaire de la Côte d’Ivoire dont la prés idence de Laur ent Gb agb o contrariait les intérêts français. L’imb roglio électoral de l’UMP n’aura sans doute pas le dénouement du vote ivoirien de 2011 dont Nicolas Sarkozy a refusé le recomptage, cela au prix de milliers de morts et pour l’instauration d’un r ég ime fa scisant à la s olde despuissances occidentales…

La roue tourne

Mais qui sème le vent récolte la tempête. La roue tourne : l’affaissement de ce part i libère la s cène nationale, suite à l’éviction de son « chef naturel » en mai 2012. Il est symptomatique que cette organisation, qui prônait en 2009 une ident ité nat ionale ethnocentrée, ait oublié de comptabiliser les suffrages de trois sections d’outre-mer.

En fait , l’UMP a perdu ses liens ataviques avec le pouvoir notamment à partir de ses échecs répétés dans les élections territoriales ; la conquête du Sénat par la gauche en fut l’aboutissement. Coupé de cette base et des périphéries, et malgré le c ha risme populiste de son dir igeant, ce parti n’a pu échapper à la sanct ion lors des dernières élections nationales.

Régénération

Cette série manifeste l’aspirat ion majoritaire à la régénération de la vie politique et de la démocratie, à laquelle doivent répondre la nouvelle équipe dirigeante ainsi que la gauche de la gauche.

Ce scénario n’est -il pa s la réplique en miniature de la crise d’une Union européenne enlisée dans ses propres contradictions ? N’est -ce pas l’Union européenne qui a co-piloté les programmes d’ajustement structurel (PAS), qui ont conduit les pays du sud au surendettement, et souvent aux régressions politiques et à la mise en cause de leur intégrité territoriale ? La voilà prise à son piège, ses États étant les nouvelles cibles des marchés et organismes financiers. La crise de l’UE est celle d’un système anthropologique fondé sur des v aleurs devenues mortifères en l’absence de contrepoids suffisants, celles d’un impérialisme parasite,d’un culte endémique de la croissance et de la compétitivité, d’un individualisme atomisant.

À l’image de l’Amérique latine, les peuples européens ne s’émanciperont du carcan néo-libéral que par l’ouverture au monde non occidental et par la promotion de valeurs alternatives, fondées entre autres sur le développement socioculturel et une coopérat ion plus authentique entre les peuples, les territoires et les citoyens.

La responsabilité des citoyens

La nouvelle mandature, celle de la pr és idence Hollande, qui a conquis tous les pouvoirs, offre l’opportunité d’une évolution en profondeur des mentalités, à l’écart des reflux inquiétants incarnés par le FN. Pour ce faire, il est de la responsabilité des citoyens de pondér er le centralisme autoritaire dont François Mit terrand alors opposant se plaisait à dire qu’il conduit sous la 5 e Répub lique à « un c oup d’État permanent ».

Décision non débattue d’une intervention militaire au Mali, conflit avec le monde associatif concernant l’a venir du ter ritoire de Notre- Dame des Landes… ces faits manifestent une énième tentation d’abuser d’un pouvoir dont une part reste illégit ime.

L’a venir dira quelle part ition pourront jouer peuples, citoyens et démocrates pour que le cours des choses soit infléchi en leur faveur.

Martine Boudet

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